LES LORIALETS 

ou Lunatiques 

 

« Au clair de la lune, mon ami Pierrot, prête-moi ta plume pour écrire un mot... »

Pierrot, le Pierrot blanc, le Pierrot lunaire qui rêve à la lune, écrit et soupire à la lune, est l'incarnation même du Lorialet.

Il est issu de la lune et ne songe qu'à y retourner.

 

Il avait imaginé pour ce faire une nacelle légère de joncs coupés et tressés à la pleine lune, recouverte de lichens de lune, accrochée par des fils fins de rayons de lune à un système de grandes voiles de soie étalées la nuit sur les prés afin de les imbiber de rosée. Il espérait ainsi qu'en s'évaporant, la rosée entraînerait avec elle le frêle esquif et le conduirait jusqu'à l'astre de ses vœux. Mais le soleil avait trop vite asséché la voilure et « faute de combustible la belle espérance était retombée comme Icare dans son rêve d'envol ». Désespéré par cet échec, Pierrot n'y accède plus qu'en songe.

 

Le Lorialet ne se plaît pas sur terre, même s'il n'est pas sélénite, il semble qu'il en soit tombé et toute sa vie « il restera dans la lune ». Il est mauvais élève et mauvais employé, pourtant il n'est ni paresseux ni de mauvaise volonté, sa tête limbifère est simplement ailleurs, parmi les fifottes du ciel.

ORIGINE

On lui connaît au moins deux origines : celle du Légendaire des Astres écrit en l'an II de l'ère elfique par Maître Her­barius et celle plus terre-à-terre des chro­niques gargantuines.  

La première le dit enfant de Séléné : Séléné, fille de Théia et d'Hypérion, personnifie la lune. Chaque soir, illuminant les ténèbres de ses chevaux argentés, " la divine Séléné-aux-larges-ailes, après avoir baigné son blanc corps dans l'océan, revêtait des vêtements splendides, et s'élevait vers le ciel, emportée sur son char par de brillants coursiers". Parfois un dragon tentait de la dévorer, alors elle se cachait, provoquant une éclipse; et les magiciennes qui la protégeaient faisaient fuir la Bête. Zeus la convoita et lui donna trois filles: Pandia, Némée et Ersé (la rosée). Pan pour la séduire se métamorphosa en vigoureux bélier avant de l'attirer dans les bosquets de l'Arcadie. . . Mais la belle ne désirait qu'Endymion (le beau au bois dormant) à qui Zeus avait accordé beauté et jeunesse éternelle à la condition de demeurer à jamais endormi.

Aussi énamourée qu'une princesse charmante, Séléné se coucha contre son flanc et, de baisers en baisers chaque soir répétés, enfanta cinquante filles. . . et un fils, si « émerveillé des choses » qu'attiré par l'azur de la planète bleue il atterrit sur terre pour épouser une Fée. Depuis, toute sa descendance ne rêve qu'à la lune. . . Le Lorialet en serait le dernier. . .

Les Chroniques gargantuines précisent que le Lorialet ou Lunatique ne serait qu'un simple mortel enfanté par un caprice de la lune: « Lorsqu'une femme se dénude à la lune en phase montante, elle s'expose à être Loarée, c'est-à-dire à être fécondée par l'esprit de la lune, et l'enfant naîtra sous son influence. Une femme qui accouche accidentellement dans un champ baigné par ses rayons mettra également au monde un enfant Lorialet- frappé par la lune. Ce Lorialet sera poète, musicien, vagabond ou cher­cheur de Fées. Il percevra l'invisible, le passé et l'avenir, et ses sentiments s'extérioriseront par la pluie et le beau temps. Comme tous les enfants enfaytés, il ne trouvera pas le bonheur sur terre et fi aura de cesse de courir les chemins lunescents à la recherche des royaumes féeriques. »

 

Fiche Descriptive

TAILLE : Le Lorialet n'est en général pas très grand - il pousse mal ­dit-on.

ASPECT : Oublions le cliché du Pierrot au visage talqué. Le Lorialet est un rêveur de lune, il n'a nul besoin de fard pour exprimer son rêve. Le Lorialet a le visage rond et pâle, le regard lointain, les cheveux ébouriffés. 

VETEMENT : Oublions également le domino blanc à pompons, la calotte noire, la mandoline et la fraise empesée. Le Lorialet est vêtu comme tout le monde, enfin presque! Très tôt chez l'enfant lunaire il est fréquent d'observer quelques débraillements, quelques écarts vestimentaires qui iront en s'accentuant.

Parvenu à l'âge adulte, ou bien il oublie de s'habiller et laisse ses vêtements se débrouiller tout seuls pour l'endos­ser; le chausser et fermer ses bou­tons, ou alors il se vêt pour attirer la lune et le regard des Fées, et frise le mirifique, la « cloche »  philoso­phique, le dandysme inconvenant. Le chapeau est de rigueur comme perchoir aux Elfines. Un jour il lui pousse des ailes seulement visibles aux autres Lorialets.  

HABITAT : Il aime les lucarnes, les tours, les greniers. Il aime les lieux de silence, les clairières et les mares lunatiques - où qu'il soit, il demeure dans la lune. 

NOURRITURE : La soupe à la grande citrouille, la tisane aux lupulines, à la minette dorée, et les saurinettes d'automne. 

MOEURS : Mélancolique, méditatif et doux, solitaire, il n'a pas d'attrait pour les amours mortelles ni pour les roucoulades de la Colombine. Les chats l'apprécient. Les vers luisants, les phalènes, les éphémères, les lucioles, les hérissons et les champignons le suivent. On l'a parfois classé auprès des 1èmpestaires car involontairement il fait tomber la pluie ou briller le soleil suivant qu'il est triste ou content.

ACTIVITÉS : Il a le don de connaître le passé et l'avenir mais ne l'exploite pas. Il est poète, musicien, météorologue, mais ne rime, ne compose, ne prévisionne qu'au secret de son cœur. On le croit alchimiste mais n'a jamais rien transmuté. Il a par contre perfectionné l'art des visions entoptiques et les voyages astraux. Ses pouvoirs et attirances magiques auraient pu faire de lui un astronome, un cosmonaute mais il répugne à équationner les paysages de l'âme et plus encore se révolte à l'idée de « conquérir » et « exploiter » les divins infinis.

Entre Terre et Lune.

J'erre entre ciel et poussière dans la solitude et le silence, le regard perdu dans les étoiles, le cœur plein de mélancolie. J'allonge le pas sous une nuit éternelle, sur un rivage infini : mon pied est léger, mon cœur est lourd, et mes larmes s'évaporent comme de l'éther dans l'espace. Mon chagrin a le prix des choses inconsistantes : je pleure pour rien du tout.
Je suis affligé, inconsolable, perdu. Je n'ai plus de joie, et mon infinie tristesse est cependant ma raison de vivre. La blonde veilleuse est mon asile : je suis PIERROT LUNAIRE.

Raphaël Zacharie de Izarra

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SOURCE DE CETTE PAGE :  « La Grande Encyclopédie des Fées » de Pierre Dubois