Découvrez cet auteur à la plume acerbe et parfois romantique comme le prouvent ces magnifiques textes sur la Lune...
Je le remercie pour m'avoir fais parvenir ses très belles créations... |
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La face cachée de la Lune Verte, sournoise, tranchante, voici la Lune qui croasse. Ses ailes d'éther sont de mauvais augure. J'aime les sourires fourbes de cette hanteuse. Point crucial de la nuit, oeil errant de la voûte, confidente des clochers, elle accompagne mes veilles, fidèle, moqueuse, attachante. Je trouve sa face subtile, sa caresse ironique, son silence mortel. Elle passe, fécondante, prodiguant mauvais rêves et bonnes fortunes. Ses quiets rayons irradient le malheur. Elle rassure les chouettes, effraie les dormeurs. Elle répand son miel dans l'espace, déverse son fiel sur les poètes, rend muettes les villes, fait parler les campagnes... Elle attise les rumeurs, ravive âtres et légendes, délie les mauvaises langues, fait fermer les portes et sceller les coffres. Il m'arrive de lui parler. Mes mots pour elle sont tendres. Mais ses éclats sont durs. On la croit pâle, molle, sereine, elle est vive, sèche, tourmentée. C'est une amie sévère qui rie avec férocité, sanglote à faire rendre l'âme. J'aime cette séductrice aux joues brillantes, au front lisse, au regard fixe. Ne vous fiez pas à ses allures candides, car la Lune en vérité est une méchante fée, une sorcière qui diffuse un parfum venimeux, suave et mystérieux sur la Terre.
Raphaël Zacharie de Izarra
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LA
PLEINE LUNE Elle
se lève sur l'horizon avec un visage pâle, des joues enflées, une tête
molle. Elle monte au-dessus forêts, routes, villages en rapetissant,
devient plus vive à mesure qu'elle s'élève. Parvenue au zénith, l'oeil
pétillant, le front clair, elle crache comme une vipère sur les oiseaux
de nuit qui la contemplent en rêvassant. Éblouissante, muette comme une
taupe, féline dans son empyrée, elle plane au-dessus des têtes,
ricaneuse. |
LA LUNE |
Pour vous rejoindre, depuis si longtemps que j'en avais conçu l'immortel projet, je me hâterai sans regret, ivre de vous, insoucieux du futur, confiant dans votre pâle éclat, attentif à votre regard paisible, envoûté par votre sourire triste et énigmatique.
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RENCONTRE
AU SOMMET Ce
soir je vais à la Lune Je marcherai à sa
rencontre, l'âme flâneuse, le pas paisible. Elle sera ronde, mon cœur
sera plein. L'astre étrange est mon asile, mon vertige, mon abîme.
Funambule vénéneuse de la voûte, chandelle errante de la nue, j'aime sa
molle course au-dessus des toits. Tantôt pâle
sourire, tantôt face de diable, son mystère s'épaissit au fil de la
nuit. C'est une grande Dame qui porte robe longue. C'est aussi une traîtresse
qui ricane derrière les égarés. Mieux vaut s'en faire une amie. Ce soir
je cheminerai sous son voilage d'éther. Je la contemplerai
longtemps, somnambulant entre bois et sentiers, la semelle terreuse, la tête
effleurant le firmament. Je lui parlerai, et le silence sera d'or. Cette nuit sera
argentée. Vagabonde sidérale, elle disparaîtra dans la brume du matin. Et moi, frissonnant de froid, je me hâterai vers l'âtre. A l'aube je m'endormirai, les cheveux blanchis de la poussière des chemins, la tête pleine des diamants de la nuit. Raphaël Zacharie de Izarra |
ENTRE
TERRE ET LUNE
J'erre
entre ciel et poussière dans la solitude et le silence, le regard perdu
dans les étoiles, le cœur plein de mélancolie. J'allonge le pas sous
une nuit éternelle, sur un rivage infini : mon pied est léger, mon cœur
est lourd, et mes larmes s'évaporent comme de l'éther dans l'espace.
Mon chagrin a le prix des choses inconsistantes : je pleure pour rien du
tout. |
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Raphaël Zacharie de Izarra
UNE VISION DES CHOSES
En
rasant la pointe du clocher, la Lune m'apparut comme un Graal à atteindre. Ce
soir-là les choses d'apparence les plus anodines dévoilaient un sens caché :
je percevais l'essentiel.
En imagination je remplaçai la pierre par le feu et l'acier : l'église devint
fusée. Le vaisseau désignait l'astre, prêt à s'affranchir de la pesanteur.
Je vis le mastodonte s'élever dans un bain de lumière, majestueux.
Je le voyais qui parcourait les profondeurs sidérales : ma pensée vagabonde le
suivait dans sa course poétique vers l'infini.
Les choses ayant pris une soudaine hauteur sous mon regard neuf, je voyais le
monde avec vérité. Devant moi la pierre inerte avait déployé ses ailes. La
matière sous l'éther s'était allégée.
Et je demeurais au pied de l'église à fixer la voûte étoilée, idiot.
Raphaël Zacharie de Izarra
AU CLAIR DE L'UNE, A L'OMBRE DE L'AUTRE (lettre à une amante chartraine)
Mademoiselle,
A
la vue de la Lune montant dans la nue, vos traits s'imposent à
moi. Toujours, je vous ai associée au disque lunaire, vous ma
claustrale, vous ma mélancolique amante. Pâle apparition aux
charmes muets et au visage vague, vous êtes l'appel du large : celui
des profondeurs sidérales et des étoiles lointaines. Vous
êtes ma consolation poétique, une sorte de lueur au firmament qui
entretient en moi le rêve. Demeurez pour toujours cette spectrale, frêle
créature croisée entre poussière et azur, entre ciel et
gargouilles. Votre orbite est onirique, vous l'astre au teint blême.
Chaque fois que je regarde la Lune, c'est votre visage que je vois
Mademoiselle, aussi doux qu'une chandelle, mystérieux comme un oiseau de
nuit, hâve tel un fantôme. Lorsque passe au-dessus mon toit la
sphère étrange, qu'elle chuchote à travers ma fenêtre, qu'elle se
fait compagne de mes insomnies, c'est vous que j'entends frapper au
carreau, vous qui hantez ma chambre, vous qui me tenez en éveil. La
Veilleuse qui luit au zénith me rappelle la triste chartraine que vous êtes.
Vous ne cessez de tourner autour de moi Mademoiselle. Et tout comme la
blanche Dame au dos rond, vos grâces sont tombales. Je
chante à l'infini votre beauté funèbre. Vous avez les attraits cosmiques des sélènes créatures et des filants objets qui peuplent la voûte, hôtes célestes que je poursuis comme un Graal à ma portée. |
Vous
ressemblez au mystère d'en haut. Vous êtes un temple, et de ce temple s'élève
une prière. Et cette prière, c'est la mienne. Et je m'adresse à vous. Et le
sens de ma prière est l'amour.
Chartres
est mon éden et ma douleur, ma gloire et ma misère. Et votre rivale de chair
qui partage mon alcôve, ma plus chère faiblesse. Vous, vous êtes mon
purgatoire, ma croix, mon linceul. Et puis ma rédemption, ma lumière, mon
salut. L'une est ma conquête temporelle, l'autre ma victoire céleste. L'une à
ma gauche, l'autre à ma droite. L'une est un peu ange, l'autre un peu diable.
Tiraillé entre ces deux feux, je me consume.
Ma
plume est une flamme et vous Mademoiselle, vous êtes un songe. Des deux
follets sont nées ces lettres d'artifices.
Je vous destine ces mots. Je m'en retourne à ma Lune, à ma compagne légitime et à mes chères étoiles, ne cessant de songer à vous.
Raphaël Zacharie de Izarra
UN
RÊVE EVEILLE
Lors d'une promenade
nocturne à cheval, une étrange aventure m'est arrivée. Je filais à molle allure sous la lune, bercé par le son suggestif des sabots de ma monture dont l'écho résonnait avec poésie dans la campagne. Mélancolique, je me mis à songer à l'improbable aimée qui tardait à venir. Mais bientôt assoupi par le pas alangui de l'animal, je posai la tête contre sa nuque généreuse. Le doux Morphée m'emporta bien vite, tandis que je demeurai à demi couché sur le cheval qui cheminait toujours. Et le songe prit le relais de la rêverie amoureuse... Mais la vision onirique prit corps, tournant à la féerie, et je crus enfin rencontrer ma belle pour de bon : Elle marchait à mes côtés, se métamorphosant
imperceptiblement en une jument superbe : ses cheveux d'or se changeaient
en crinière et sa robe claire épousait ses chairs. Je la montai, tout ému,
et elle m'entraîna aussitôt dans une chevauchée impétueuse pour
prendre son envol vers l'astre de nuit. |
Enfin, dans un furtif tourbillon nous disparaissions vers les étoiles.
Reprenant mes esprits, je m'aperçus que je m'étais égaré durant mon bref
sommeil sur le dos du cheval qui, impassible, avait continué sa marche. Et,
retournant sur mes pas, je fixais la lune qui éclairait mon chemin, songeur,
l'air dubitatif...
Ému.
Raphaël Zacharie de Izarra
CELUI
QUI EST EN MOI
Le
son des pas du cheval dans la plaine me fait songer à chaque étoile que
compte le ciel de ma longue nuit. Lorsque je foule la poussière des
chemins, c'est toujours vers le firmament que se tournent mes regards.
Tous
les astres du monde sont logés dans mon cœur comme autant de larmes ou
d'émeraudes, selon que je suis triste ou plein de joie. Je porte en moi
les chagrins les plus secrets, les plus futiles de l'univers. Mais je sème
aussi les lumières les plus pures dans les cœurs. En quête d'un amour
que je suis seul à concevoir, je parcours le monde depuis des siècles en
infatigable rêveur, trouvant la force de durer à travers les âmes
pures. Ma jeunesse est intacte, préservée par des siècles de vertu. Mon
souci n'est pas l'or, ni le temps, ni la mort qui effraie tant les hommes,
mais l'amour, la beauté, la poésie. Aussi, je ne puis mourir : l'infini
est mon compagnon de route. Loin de vos lois, je règne en souverain sur
vos nuits, vos songes, l'imaginaire. Parfois
on me tend la main sous la Lune : je prends la forme d'un paysage, d'un
feu follet, d'une chandelle. Là, j'apparais dans mon ineffable vérité.
Je
poursuis ma route la tête dans les constellations à la rencontre des âmes
pures. Je
suis un fou d'amour, un spectre, une flamme traversant le temps, accroché
à des incarnés. Je voyage d'âme en âme. L'être dont je possède le
souffle aujourd'hui est l'auteur de ces lignes que vous êtes en train de
lire. J'ai
pris possession de lui et je prends la parole à travers sa plume. Mon
nom est Pierrot. Raphaël Zacharie de Izarra |